Dans l’article Donner des consignes aux enfants ?! Oui, mais comment ?, j’explique qu’il est important de comprendre qu’une bonne discipline ne se limite pas à obliger un enfant à obéir ou à être poli avec les autres. Qu’en fait, pour bien la mettre en pratique, il fallait que l’adulte adopte des comportements et des attitudes qui permettent de le guider, de l’éduquer à apprendre graduellement des comportements acceptables. Une fois que, comme adulte, on comprend ce rôle et l’importance qui en découle de le faire avec respect, il faut maintenant se pratiquer et le mettre concrètement en application.
Guider … oui, mais comment ?
Guider son enfant vers des comportements acceptables, en lien avec ses propres valeurs, n’est pas une mince tâche. C’est un processus qui commence dès les premiers mois de vie et qui se continue tout au long de celle-ci. Elle a donc comme base quelques principes. Je vous les rappelle :
- Manifester des attitudes de respect, d’amour et d’écoute;
- Définir des règles claires et cohérentes;
- Avoir un nombre limité de consignes;
- Donner clairement ses attentes et en valider leur compréhension;
- Expliquer ce qui s’en vient;
- Prôner des règles conséquentes;
- Avoir une cohérence dans l’approche de la discipline en famille.
Faut-il intervenir de la même façon pour tous les comportements ? La réponse est non, car les raisons qui expliquent les comportements des enfants ne sont pas les mêmes. À ce moment, vous devez adapter votre intervention et proposer des solutions en lien avec les raisons et les besoins identifiés. Dans le texte qui suit, je compte illustrer ces propos par un exemple tout en proposant quelques interventions qui vous aideront dans votre rôle de parent guide.
Comprendre les comportements
Contrairement à ce que la plupart des gens croient, les comportements ont tous une raison qui les expliquent. Ainsi, un enfant qui fait une crise peut la faire parce qu’il vient de se faire dire non ou encore parce qu’il est tout simplement malade ou fatigué. Ce qui est difficile pour les adultes qui côtoient les enfants c’est de comprendre la raison qui explique le comportement. Une fois que nous la trouvons, il est possible de lui associer un besoin et une intervention liée directement à ce besoin. Dans le cas de l’enfant qui fait une crise, car il vient de se faire dire non, quel serait son plus grand besoin à votre avis ? Selon son âge et le contexte où se produit la crise, il est possible qu’il ait besoin de comprendre les limites, c’est-à-dire les consignes à respecter et le fait qu’il lui arrivera de se faire dire non. À ce moment, comme votre rôle est de le guider, votre intervention doit être pensée en fonction de cet aspect et aussi en fonction du fait qu’il a droit d’exprimer sa colère, mais que la consigne ne changera pas malgré la crise.
Pour illustrer ce propos, prenons un exemple dont je suis certaine que plusieurs d’entre vous ont vécu ou observé dans les centres d’achats. Lorsque nous magasinons avec nos enfants, que se passe-t-il ? Ces derniers voient une multitude de jouets et d’objets qu’ils n’ont pas à la maison et qu’ils aimeraient bien posséder. Que font-ils ? Ils nous font des demandes ! Maman, papa, regardez, je n’ai pas cette Barbie et je la veux ! Papa, ce camion est vraiment gros et je veux que tu me l’achètes ! Qu’arrive-t-il lorsque nous disons non ?? Certains enfants se fâchent et font une crise ! En fait, ils sont fâchés de notre refus (ceci est la raison) et ils ont besoin de comprendre que ce n’est pas possible de tout avoir sur demande, qu’il y a des consignes à respecter et qu’il y a une façon acceptable d’exprimer sa colère. L’enfant a le droit de se fâcher. Guidez-le graduellement à l’exprimer en lui disant que vous voyez bien qu’il est déçu ou fâché de ne pas pouvoir prendre la Barbie ou le camion. C’est important de lui mentionner que vous comprenez son souhait (qui est d’avoir tout de suite le jouet), mais que ce n’est pas possible pour l’instant, même s’il fait une crise. Même si c’est difficile, essayez de ne pas céder à cause de la peur du jugement des gens qui vous observent. Restez calme, parlez doucement à l’enfant en lui répétant plusieurs fois que vous n’allez pas acheter le jouet convoité même s’il crie ou donne des coups. Ici, plusieurs options s’offrent à vous si la crise perdure. Vous pouvez dire à votre enfant que vous allez lui demander de s’asseoir dans le panier pour l’aider à se calmer ou encore, lui demander s’il veut un câlin pour diminuer sa peine, bref, je vous recommande fortement de ne pas céder et de terminer quand même vos autres achats, car si nous ne le faites pas, quel message envoyez-vous à votre enfant ? Que les crises qu’il fait vous dérangent et qu’il a trouvé une façon de vous faire réagir, même s’il n’a pas eu le jouet demandé. Je vous le dis, pour l’avoir vécu, c’est plus payant de ne pas céder, de rester calme et de lui répéter que sa crise ne vous dérange pas au lieu de quitter. Car la fois suivante, que fera votre enfant ? Il aura compris que ses crises vous indisposent et qu’il a trouvé une façon de vous faire réagir en public. Par contre, si vous ne cédez pas, il verra que ces dernières ne vous dérangent pas et qu’elles ne servent à rien, car en retour, il n’obtiendra rien à en faire ! C’est difficile de ne pas céder, mais combien payant, car les crises diminueront en intensité et en quantité d’une fois à l’autre et le magasinage deviendra alors plus agréable !
Il existe aussi une façon de prévenir la crise au magasin. Comment s’y prendre ? Tout d’abord, je vous proposerai de donner vos attentes en entrant dans le magasin. Prenez 2 minutes pour dire à votre enfant que oui, il verra sûrement plein de belles choses, mais que, aujourd’hui, vous venez acheter … (nommer un ou deux articles). Pour la gestion des jouets, c’est à vous de voir quel compromis vous souhaitez faire … un bon compromis qui a bien fonctionné dans mon cas (et qui fonctionne encore), c’est que je permets à mes enfants de regarder et de toucher aux jouets pendant 5 ou 6 minutes et que, une fois les 5 minutes terminées, nous partons sans en acheter. S’ils en veulent, je leur propose de les écrire sur une liste pour leur fête ou pour Noël. Ceci fonctionne vraiment très bien ! J’ai bien eu des crises au début, mais je n’ai pas cédé … j’ai toujours gardé ma constance et rappelé mes attentes à chacune de mes visites dans les différents magasins.
Étant donné que l’application de la discipline est un sujet qui demande un retour sur soi et une analyse de ses pratiques, ce sujet mérite que je continue d’en parler dans le prochain article Répéter moins longtemps ou moins souvent … est-ce possible ?
Je continuerai donc en spécifiant d’autres raisons qui expliquent les comportements, en donnant des idées d’interventions appropriées et en démystifiant les notions de réparation, de rachat, de punition et de conséquence.
Médiagraphie
- BOURCIER, Sylvie (2008). L’agressivité chez l’enfant de 0 à 5 ans, Éditions du CHU Sainte-Justine, Montréal.
- BOURCIER, Sylvie (2006). Le grand monde des petits de 0 à 5 ans, Édition de l’Hôpital Saint-Justine, Montréal.
- BOURCIER, Sylvie (2004). Comprendre et guider le jeune enfant à la maison, à la garderie, Édition de l’Hôpital Sainte-Justine, Montréal.
- DUCLOS, Germain et Martin Duclos (2005). Responsabiliser son enfant, Les Éditions de l’Hôpital Sainte-Justine, Montréal.
- MINISTÈRE DE LA FAMILLE ET DES AÎNÉS (2007). Accueillir la petite enfance, Le programme éducatif des services de garde au Québec, Québec.
- RACINE, Brigitte (2008). La discipline, un jeu d’enfant, Les Éditions de l’Hôpital Sainte-Justine, Montréal.
- RACINE, Brigitte. Coffrets DVD de ses conférences Éducoeur.